Dans ce qui était l'ancienne Novempopulanie, les Vascons s'étaient regroupés autour de Sanche-Loup (Sancius-Lupus), puis de son fils aîné, Aznar-Sanche. Quand celui-ci mourut, assassiné par le roi d'Aquitaine Pépin Ier, c'est son frère Sanche Mitarra (Sancius-Mitarra) qui prit le commandement du pays, en 836. Sanche Mitarra avait passé sa jeunesse à combattre l'Emir de Cordoue dans la Vasconie du Sud (Navarre et Haut-Aragon) aux côtés de son père. Ses qualités militaires mais aussi politiques le firent triompher de Pépin Ier qui lui avait déclaré la guerre. Les troupes de Pépin Ier avaient été repoussées sur la rive droite de la Garonne à l'époque où mourut Pépin Ier (838) : 68 ans après le coup de force de Charlemagne, la Vasconie avait retrouvé ses anciennes frontières naturelles. Le roi franc Louis le Pieux, ayant à faire face à de nombreuses difficultés, reconnut à Sanche Mitarra le gouvernement de la Vasconie. A la mort de Louis, l'Empire fut partagé entre ses trois fils, dont Charles le Chauve, qui en reçut la partie occidentale et notamment le Royaume d'Aquitaine. Pépin II, d'abord dépouillé de son trône d'Aquitaine, en entreprit la reconquête, qu'il mena à bien grâce aux difficultés que connaissait Charles (les démêlés avec ses frères et les premières incursions normandes). Pépin II s'enhardit alors à pénétrer sur les terres des Vascons, en 852. Mal lui en prit car il fut capturé par Sanche Mitarra, qui le livra Charles le Chauve. C'est à cette époque qu'apparut dans les textes le duché de Gascogne (852) dont Sanche Mitarra fut naturellement le premier Duc.
A partir de 840, les
Normands arrivèrent sur les côtes atlantiques. Sur leurs embarcations,
ils remontaient chaque année les fleuves pour piller le pays (Toulouse
est mis sac et brûlé en 844). Ils s'en prenaient tout particulièrement
aux églises et aux monastères et exigeaient de lourdes rançons
de la population. Condom, Eauze et Lectoure furent parmi leurs victimes les
plus touchées. C'est à ce moment-là (autour de 854)
que l'église transféra son siège d'Elusa, la vieille
capitale de la Novempopulanie, à Auch, moins exposée, car bâtie
sur un oppidum très abrupt, et dont Sanche Mitarra avait fait sa résidence
ordinaire quand il ne combattait pas de l'autre côté des Pyrénées,
son ennemi de toujours, l'émir de Cordoue, et ses alliés.
Au Xème siècle, les pirates
choisirent le nord de la France, plus facile d'accès, pour se livrer
à leurs raids dévastateurs. En 982, ils furent
finalement massacrés à Taller, près de Castets, à
une vingtaine de kilomètres au nord de Dax, par Guillaume, fils de
Sanche III, duc de Gascogne. Le pays était délivré à jamais
des hordes barbares.
Sanche Mitarra disparut en 864. La Vasconie était de nouveau indépendante du pouvoir franc, et était devenue pour l'Empire un rempart contre les royaumes arabes de la péninsule ibérique.
Le Duc Arnaud, neveu de Sanche Mitarra, prit alors le pouvoir, car le fils de Sanche Mitarra était encore trop jeune. La Vasconie du Nord connut un état proche de l'anarchie, notamment sous le coup des invasions normandes qui avaient repris : la plupart des évêchés et des monastères étaient désertés, les habitants des villes et villages fuyaient dans les campagnes. Les chefs locaux assuraient tant bien que mal un semblant d'ordre et de protection : le système féodal, avec ses seigneurs et ses châteaux forts, était en train de se mettre en place. Conformément aux coutumes, le pouvoir revint alors au fils de Sanche Mitarra, nommé Mitarra-Sanche, qui était de la même trempe guerrière que son père. Il parvint à maintenir les Normands sur la côte, à l'embouchure de l'Adour, tout le temps de son règne (871-886). Son fils, Garcie-Sanche, «le Tors», (Garsia-Sancius-Curvum) lui succéda de 886 à 920. A sa disparition, la Vasconie du Nord s'était encore agrandie du Comté d'Agen, par mariage, et le Roi de France, Charles-le-Simple, l'avait reconnu comme "Comte et Marquis sur les limites de l'Océan". Malheureusement, Sanche le Courbé, avant sa mort, décida de partager ses terres entre ses trois fils : l'aîné Sans-Garcia (Sanche Garcie) reçut la majeure partie du Principat (toute la partie occidentale, du Béarn à la Lomagne), qui devint la Vasconia Major (Grande Gascogne). Le second, Guilhem-Garcie, reçut la partie centrale, avec le Fezensac, entre Eauze et Auch, et le dernier, Arnaud-Garcie, l'Astarac, entre Fezensac et Bigorre (voir carte du partage).
Ce partage malheureux conduisit petit
à petit à un éclatement de la Vasconie, et la filiation
princière rompue amena un système d'autorité importé
du modèle franc : les rapports de vassalité, la féodalité,
jusqu'alors inconnue en Gascogne.
Sans-Garcie eut quatre fils : Garcie-Sans, Sans-Sancio, Guilhem-Sans et Gombaud
et c'est Sans-Garcio qui lui succéda, mais mourut sans enfant. C'est
donc au troisième fils, Guilhem-Sans, qu'échut le Principat.
Guilhem-Sans partit combattre en Navarre et délégua son pouvoir à
son frère Gombaud. Il revint pourtant "aux affaires" lorsque
les Normands se montrèrent de nouveau menaçants. Il décida
alors de se débarrasser une fois pour toutes de ces dangereux voisins,
et les battit à Taller en 982. Les Normands décampèrent
et ne revinrent plus jamais en Gascogne.
Le comté d'Armagnac, formé en 965, échut à Bernard à la mort de Guilhem-Garcie. Quant au Pardiac, il devint l'apanage d'un autre Bernard, fils d'Arnaud Garcie, suite au décès de ce dernier. Virent également le jour le comté de Gaure et le vicomté de Lomagne. Le morcellement continua avec les générations, à tel point que le dernier duc n'avait plus aucun pouvoir. Sous la double égide de la puissance ecclésiastique et féodale, la Gascogne poursuivit toutefois son organisation. Quatre évêchés furent constitués et, à la veille de l'an 1000, il y eut plus de quatre cents églises construites. Les ducs, jouant sur la faiblesse des premiers Capétiens, manifestèrent leur autonomie. Sanche Guilhem, fils du vainqueur des Normands, Guilhem-Sans, mourut sans successeur en 1032. Le mariage de sa sœur Brisce avec Guillaume V, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine fut à l'origine d'un conflit de succession qui dura jusqu'en 1052. L'un des principaux prétendants, Bernard Ier Tumapaler, comte d'Armagnac, se laissa alors dépouiller de son héritage par le petit-fils de Guillaume, Guy-Geoffroy, duc d'Aquitaine depuis 1058. Les ducs poitevins gouvernèrent la Gascogne pendant près d'un siècle, s'efforçant de réduire leurs vassaux à l'obéissance. Lors des croisades, nombre de nobles gascons intervinrent en Palestine, notamment avec la troisième armée du comte de Toulouse. Parmi les premiers croisés qui se couvrirent de gloire figurent, à côté de l'illustre Gaston IV de Béarn, Raymond de l'Isle-Jourdain et Astanove, comte de Fezensac.
à suivre...